Ecole de Adi Yoga - Nantes et Ile de France
 
Jour 253

Jour 253

Épuisé, je suis continuellement épuisé. Je crois que la morphine fait de moins en moins effet. Pourtant, le médecin a diminué les dosages. Je n'ai pas commencé à diminuer, alors que vais-je devenir ? Mes journées se passent à dormir la moitié du temps. A quoi bon ? Qu'est-ce que cela a de créatif, ou même d'intéressant ? Hier soir, j'ai squeezé la dose du soir. Eh bien, j'ai vite changé d'avis ! La nuit, je transpire au point de tremper les draps. Ça me réveille. En général, je me relève pour aller manger une mandarine ou un kiwi, et quand je me recouche, je grelotte dans les draps humides et froids.

En même temps, je ne trouve plus le courage de pratiquer le yoga que m'avait indiqué mon prof préféré, Serge Gastineau. D'un autre côté il m'avait dit : "pense aussi à te foutre la paix !" Cupide, j'en profite un peu... 😉

La guerre en Ukraine (je n'ai que ça à penser...) me déprime. Ce n'est pas tant le conflit actuel que la situation de l'humanité perdurant depuis l'aube des temps. Déjà enfant, je trouvais insupportable de vivre dans un monde où règne continuellement la guerre, la méchanceté, et les adversités de toutes sortes. Je ne comprenais pas pourquoi nous ne pouvions pas vivre simplement, aller, faire, dire ce que bon nous semble. Je croyais que la liberté et l'amitié étaient des choses naturelles accompagnant normalement le simple fait d'exister. Maintenant, je comprends, bien sûr, mais je n'admet toujours pas. C'est insupportable. Je me dis que je suis SUR cette planète, mais que je ne suis DE cette planète. Et alors, où cela me mène-t-il ?

Heureusement qu'il y a ce journal. Heureusement que, de façon indirecte au vu de mon état, je peux partager une certaine vision du monde, de soi et de notre destinée bienheureuse possible. Les enseignements de l'Adi Yoga sont tellement formidables ! Il y en a d'autres bien sûr.

Je me pose toujours la question de renaître dans ce monde qui, si nous continuons de suivre cette trajectoire, sera dans quelques décennies tellement épouvantable que pas un être conscient ne souhaiterait y vivre. Un jour, exprimant ce doute à un de mes maîtres, il me répondit qu'il y avait des dimensions supérieures, sous-entendant que je pourrais toujours m'y réfugier. Ça ne m'a pas plus, ça n'était pas du tout un encouragement à réaliser mes vœux de Bodhisattva. Ou alors m'aurait-il jugé si faible qu'il m'indiquât un moindre refuge ?

Toujours est-il que je continue de me poser la question. Et la seule réponse qui me semble bonne et intelligente est qu'il faut absolument se libérer maintenant et totalement du samsâra et vivre dans la pure Claire-Lumière, là, maintenant, tout de suite. Après, plus rien n'a d'importance et tout les possibles surgissent d'eux-mêmes.

J'ai peur aussi de me réfugier dans l'esprit seul. C'est pourquoi je fais tant d'efforts pour investir et réinvestir la conscience dans la matière, dans ce corps si défaillant. Cela aurait été plus facile sans la maladie. Mais peut-être aussi que cette perspective ne serait pas apparue sans la maladie...

Si je vivais dans l'esprit seul, ce que recommandent tant de spiritualistes irréfléchis aujourd'hui, je ne souffrirais pas de la guerre, de la méchanceté et de la manipulation. Mais où trouverais-je alors l'esprit de compassion, la tendresse qui sied au Guerrier Spirituel, la force de montrer la Lune du doigt ? Que serait un Éveil, seul et pour soi seul agrémenté de qualités magnifiques mais interdites au partage universel ?

Je sais bien que le Bouddha ne se pose pas de questions aussi stupides, quoique fondamentales. Mais quand on est stupide, elles sont justement fondamentales !

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