L'esprit n'est ni bon ni mauvais. Il est neutre, par exemple comme le ciel qui n'est ni grand ni petit. Les pensées, les émotions, sensations, volitions... surgissent naturellement en dépendance de l'esprit. Elles sont parfois négatives, d'autres fois positives et le plus souvent bigarrées. On pourrait les considérer comme des serviteurs, les serviteurs de l'esprit. Notre problème est qu'en général ces serviteurs prennent le contrôle de l'esprit et le réduisent en esclavage. Finalement le serviteur devient le maître et nous souffrons parce que le (notre) monde "tourne à l'envers"! Ce, ou plutôt ces serviteurs (car ils sont légions!) nous mènent par le bout du nez, et parfois nous désirons nous en débarrasser. Nous rêvons d'être libre.

L'ennui est que nous concevons cette liberté dans la mesure des spécificités de notre expérience d'esclave, je veux dire avec un esprit justement sous le contrôle de ses propres productions. Alors, une question brûle les lèvres : et si mon rêve de liberté était lui aussi un de ces serviteurs despotes? "Arggghhhh!" dis-je...

C'est en raison de cette problématique que la méditation ne peut s'approcher à la manière d'une croisade visant à libérer l'esprit en tordant le cou à ses ravisseurs. Et c'est aussi pourquoi nous devons dépasser la religiosité manichéenne afin de découvrir une voie réellement subversive qui nous permettrait de sortir de cette problématique plutôt que d'essayer de la résoudre.

Lâcher-prise : laisser tomber tout ça, gentiment, et être être être présent. Voici une piste à suivre. Et un bien bon auto-cadeau à s'offrir. Traditionnellement, ces "despotes" sont appelés klesas, ce qui signifie purulences ou infections. Le Bouddha enseignait la manière de les assécher. Pas de vaccin! Pas d'antibio! De l'air... de l'air... Circulez! Lâcher-prise, c'est ouvrir chaque pore de la peau du corps, chaque pore de la peau du cœur, chaque pore de toutes les peaux de notre être. C'est pourquoi, au début, la méditation a besoin d'air et que la respiration y occupe une place privilégiée.

Ceci est une explication du "niveau extérieur" selon laquelle l'énergie de l'insatisfaction est utile sur la voie de la délivrance, mais pas comme on imagine qu'elle pourrait l'être.